Normalité accidentelle

  Chaque fois que je sors de chez moi, il me suffit de quelque pas pour entamer la grande artère expulsant tous les matins de ses innombrables immeubles, un flot d'inconnus ne voulant pas forcément mon bien, mais ne me souhaitant pas de mal non plus. C'est pourquoi j'aspire au tournant de la rue qui m'éloigne de toute hostilité, une grande goulée d'oxygène, me noyant dans cette neutralité comme dans un bain de jouvence.

  Je vois des gens sortir de chez eux en claquant la porte, des enfants dévaler des escaliers dans un joyeux tohu-bohu, et je ne peux m'empêcher de me dire que tout ce petit monde est infiniment vivant, avec ce que cet infiniment vivant possède comme composantes naturelles et inoffensives. Des réveils ont très certainement sonné sur un bip, ou une station de radio réglée à un volume suffisant pour ouvrir les yeux. Les enfants ont sans doute entamé leur petit déjeuner avec un minimum de tumulte, de leurs petites voix encore endormie mais bien présentes. Ensuite, tout le monde sera aller se laver en allumant lumière, et tournant robinet de douche dans un ballet de pas pressés.

  Enfin, chaque matin les gens s'ébrouent avec leur lot de peines et de joies, de cris, de pleurs, de frémissements, d'agitation ou de souffle qui font que la vie ne demande pas autre chose que d'être.

  Comment se fait-il que plus le temps passe, plus je ne cesse d'être étonnée de voir les autres vivre ? comme si depuis mon harcèlement je n'étais que spectatrice de la trémulation du monde, et que je ne savais même plus ce qu'était mettre un pied devant l'autre.

  Comment se fait-il que la normalité soit si extraordinaire ? Pourquoi faut-il que mes pas à moi soient si lourds, que la moindre esquisse d'une action de ma part m'expose à la vindicte alentour, à des harceleurs marinant dans leur immonde pus malfaisant, ne semblant avoir d'autre but dans leur médiocre vie que celle de me nuire ?

  Comme si ils avaient poussés là telles des mauvaises herbes, au creux de ce bitume venimeux. C'est à croire que ma harceleuse de voisine (mamie gâteau) ne mange pas, ne dort pas, ne se lave pas, ne marche pas, ne parle pas. Elle est là, statique, espionnant dans un silence assourdissant de haine, le signe que je suis bien vivante pour agir. Que ce soit la nuit en me violant le crâne de ses ondes électromagnétiques maudites, ou le jour en effectuant ses petites allées et venues perfides, rien de ce qu'elle fait n'est innocent. Tout n'est que calcul, fiel, et méchanceté viscérale.

Comments

[infrason]

Merci, pour votre encouragement Laproscrite.

[infrason]

Bonsoir Laproscrite, vous exprimez ma propre pensée " Comment se fait-il que plus le temps passe, plus je ne cesse d'être étonnée de voir les autres vivre ? comme si depuis mon harcèlement je n'étais que spectatrice de la trémulation du monde, et que je ne savais même plus ce qu'était mettre un pied devant l'autre.

Comment se fait-il que la normalité soit si extraordinaire ? Pourquoi faut-il que mes pas à moi soient si lourds, que la moindre esquisse d'une action de ma part m'expose à la vindicte alentour, à des harceleurs marinant dans leur immonde pus malfaisant, ne semblant avoir d'autre but dans leur médiocre vie que celle de me nuire ?" Moi, ils m'ont assassiner socialement, je suis anéantie et ruiner par spoliation avec leur manigance et les attaques de toutes part...