L'effet papillon

Bientôt de retour chez moi, ce qui signifie également le retour des hostilités, avec son lot de petites crasses prébubères, les tictictic et tralala d'azimutés qui s'ignorent, le besoin irrépressible de me faire entendre qui sont les plus forts, les plus aguerris dans l'art de nuire, les plus assidus dans la perpétration du mal, les plus disposés à poursuivre dans la voie du pire, le tout bien emballé sous l'enveloppe du meilleur.

Le modèle français a encore de beaux jours devant lui, aucun doute là-dessus. Pendant qu'on stigmatisera les moins obéissants, d'autres cajoleurs de la république, ayant coché toutes les cases du citoyen irréprochable, pourront continuer de s'adonner au pire avec l'assentiment silencieux de la matrice à l'appellation d'origine contrôlée, estampillée bon sujet. Vous, êtes le mauvais, le borderline, à jamais à côté de la plaque de la république, avec un profil qui décidément ne correspond pas à notre Marianne. Insolvable à perpétuité, et ce, contrairement à ce qu'on pourrait croire, indépendamment de toute question d'origine, de genre et de religion. On ne vous aidera jamais parce que vous ne serez jamais dans les clous, et dans l'impossibilité de faire dans la figuration. En vous remerciant.

Voilà, du moins, ce qu'il me semble avoir compris pendant ces quelques jours d'absence. Cette explication m'est apparue comme une révélation, quelque chose qui m'a semblé extrêmement clair d'un coup, incontestable, aussi limpide que ce que le monde est capable d'offrir comme supercherie. Il n'y a pas de limite à l'imposture et ça gangraine tout, même les caractères dont auparavant vous vous seriez senti le plus proche. Aucun être n'échappe à ce massacre de la pensée,  désormais méthodiquement codifiée et dont vous êtes le témoin muet, spectateur éternel de la décrépitude du bien commun au profit du moi-je. Inutile de faire le tour d'une question laquelle en soi n'exige aucune réponse, les faits sont là, indubitables. Les vôtres sont devenus eux, des ennemis brouillés par ces bribes d'affect qui vous auront trompé jusqu'au bout de votre persévérance. Il me faut donc revenir chez moi avec ce bardas chargé d'une nouvelle donne.

J'ai néanmoins profité de la distance pour tenter d'en savoir un peu plus sur les possibilités que le harcèlement se délocalise en fonction de mes déplacements. Certains moments m'ont semblés suspects même si loin de chez moi la plupart des douleurs physiques se sont évaporées à mesure que je prenais de la distance. Acouphènes, piqure dans la bouche au moment du coucher, et autres hostilités sonores intervenant de manière ponctuelle ne m'ont cependant pas permis d'infirmer ou confirmer la possibilité que la persécution s'exerce à distance.
En attendant, les goélands vont bientôt se remettre à chanter...